Musique: The Doors - People Are Strange
Pourquoi j'ai l'impression que les gens me regardent, me jugent?
Pourquoi quand je marche dans la rue je pense systématiquement à la démarche que je dois adopter, à comment me déplacer, à comment me comporter quand je croise quelqu'un?
Toujours la même chose, encore et encore. J'enfile un jean qui traîne pas très loin, j'attrape le premier t-shirt venu. Mon écharpe hop! Un tour ou deux mais pas trop serrée pour ne pas étouffer. Au tour du sweat, je rabats la capuche sur ma tête pour pouvoir enfiler mon manteau. Je boutonne: un, deux, trois boutons. J'attrape mon casque, le branche à mon portable. Je galère à entortiller sur lui même le fil de trois mètres de long mais tant pis je l'aime mon casque. Je range tout ce petit bazar dans la poche intérieure de ma veste et hop c'est parti!
L'ascenseur troisième étage... Ou comment mettre parfaitement à profit ce petit temps de répit pour choisir quelle sera la première chanson que j'écouterais, celle qui m'aidera à me sentir confiant. J'ai tout juste le temps de faire mon choix que me voilà au rez de chaussée.
Ouvrir la porte de l'ascenseur, se regarder une dernière fois dans la glace, sortir une clope de sa poche, appuyer sur le bouton pour ouvrir la porte, puis m'arrêter en haut des marches. Dernière grande inspiration, j'allume ma clope, j'allume mon son, je descend les marches... A nous deux!
Mais voilà, à peine quelques pas franchis que ma peur me revient. Pourquoi j'ai l'impression de ne pas réussir à marcher normalement? Ma jambe gauche traîne, ou c'est mon bras droit qui ne bat pas en rythme. Je sens ma démarche devenir lourde. J'arrive vers quelqu'un... merde.
Se calmer, respirer doucement, se concentrer sur la musique. Allez après tout, ce n'est pas si méchant, il va pas te bouffer! Ca m'étonnerait qu'il s'arrête devant toi, te pointant du doigt pour s'écrier "Regardez!! Regardez comme il a l'air ridicule!".
Marcher en rythme avec la musique, regarder droit devant soit, tirer une taffe tranquille sur sa clope. Tout va bien. Mais non, justement rien ne va! Le voilà qui se rapproche. Ma respiration se coupe, je n'ose même plus entrouvrir ma bouche pour recracher ma fumée. Pourtant je dois avoir l'air bien plus con à marcher comme si j'avais un balais dans le cul en crachant la fumée par mes narines. Regarder devant soi, non! Le regarder, non! Mon regard se perd vers le ciel, vers le sol, vers lui, devant.
Il arrive..
Je sors mon téléphone, fait semblant d'écrire un texto ou de changer de chanson et ne relève la tête qu'aprés l'avoir dépassé. Bon c'était pas si terrible. J'ai fait 10 mètres sur les 200 qui me séparent de la station de métro. Sur les 200 qui me séparent de ces centaines de regard qui me dévisagent, qui me jugent.
Pourquoi autant se soucier du regard des autres? Alors qu'au fond ils s'en foutent certainement de moi. Lequel de ces inconnus se souvient m'avoir croisé? Aucun je pense. Et pourtant je sens le poids de leur millier de regards sur mon échine.
J'aimerai simplement avoir le courage de m'affirmer et de m'en foutre de ce que pense les autres.
